Google collecte les données médicales de millions d'Américains en toute légalité

Sabrina Fekih |

Depuis quelques jours, Google défraie la chronique outre-Atlantique, et pour cause. Le géant de la tech est accusé de happer et d’utiliser les données médicales de millions d’Américains. Identités, antécédents, résultats d'analyses, diagnostics médicaux… Tout y passe.

Après la publication d'un article du Wall Street Journal révélant un partenariat entre Google et le réseau de santé Ascension, les deux acteurs ont communiqué officiellement sur le sujet. Maintenu quasiment secret jusqu’alors, le projet dit « Nightingale » (du nom de Florence Nightingale, infirmière britannique du XIXe siècle, connue pour l’usage des statistiques dans le domaine médical), mêle à la fois des employés Google et des employés d’Ascension, un réseau gérant près de 150 hôpitaux aux États-Unis.

David Feinberg, responsable de Google Health. Image Google

Ce partenariat prévoit le transfert des données d'Ascension vers le cloud de Google dans le but de réaliser divers traitements. Il est question d'améliorer la gestion administrative des dossiers, mais aussi de suggérer automatiquement des traitements ou d'autres actes médicaux pour les patients, à l'aide de machine learning.

Bien que ce partenariat soit légal, les données ne sont pas anonymisées et les personnes travaillant sur ce projet (environ 300) ont accès a tous les détails concernant les patients. David Feinberg, responsable de Google Health a tenté, tant bien que mal, de rassurer en déclarant qu’« aucune donnée sur les patients n'est utilisée pour les recherches de Google sur l'intelligence artificielle », rapporte Bloomberg. Et d'ajouter que l’entreprise se limite à ce à quoi elle est autorisée.

Ce partenariat n’est qu’une des nombreuses initiatives conduites par Google dans le domaine médical. Au fil du temps, l'entreprise a démontré son intérêt en multipliant les partenariats du genre. On retrouve, sur son site, une cinquantaine d’universités et de groupes médicaux parmi ses clients Cloud. Ces organisations utilisent Google afin de « gérer en toute sécurité les données de leurs patients », précise la société sur son blog.

Quand bien même ce partenariat soulève des craintes, cette collecte de données n’a rien d’illégal aux États-Unis. Contrairement à la France où le secret médical pèse lourd, la loi américaine de 1996 sur la santé et l’assurance maladie (HIPAA) autorise les hôpitaux à partager des données avec des partenaires privés, sans nécessairement informer les patients. Une flexibilité juridique qui fait la part belle aux entreprises de la tech qui cherchent à améliorer leurs IA en matière de santé.

Google est loin d'être le seul à investir le domaine de la santé. Encore récemment, Apple a lancé trois études en collaboration avec des établissements médicaux aux États-Unis. Ces études exploitent l'application Apple Research et l'Apple Watch pour collecter et remonter des données.

De plus, plusieurs dizaines de médecins ont rejoint les rangs de la firme de Cupertino pour développer de futurs produits, notamment. Apple opère même deux cliniques par le biais d’une filiale, AC Wellness.

Amazon s'est pour sa part associé à Berkshire Hathaway et JPMorgan Chase pour proposer une assurance-maladie aux salariés des trois groupes. De son côté, Uber prévoit de lancer un système de prise en charge pour des trajets non urgents vers les centres de soins.

Toutefois, Google inquiète plus que les autres quand il s’agit de collecte de données personnelles. Parmi la ribambelle d’articles, un internaute s’interroge, en commentaire, des dizaines de recherches sur sa santé qu’il a pu effectuer via le moteur de recherche, se demandant si tous les symptômes qu’il a renseignés pouvaient être utilisés.

Cette méfiance envers Google s’est accentuée depuis l’acquisition de Fitbit, spécialiste des trackers d'activité, pour la coquette somme de 2,1 milliards de dollars. Le quotidien The Guardian a partagé plusieurs témoignages d’utilisateurs Fitbit se disant prêt à jeter leurs appareils à la poubelle.

En juillet dernier, Google ainsi que le centre médical de l'Université Chicago ont été poursuivis pour avoir échangé des centaines de milliers de dossiers de patients sans avoir retiré les éléments identifiables, dont les notes des médecins.


avatar NathanRDN | 

Ça serait intéressant que vous parliez du fait que Google voudrait lancer des comptes courants aux US l’année prochaine. Données Santé + Banque le parfait mélange explosif

avatar Paquito06 | 

“David Feinberg, responsable de Google Health a tenté, tant bien que mal, de rassurer en déclarant qu’« aucune donnée sur les patients n'est utilisée pour les recherches de Google sur l'intelligence artificielle »”

C’est vraiment le dernier de nos soucis.
Le problème, c’est qu’une firme proposant une couverture medicale mette la main dessus. Ainsi, les offres peuvent etre adaptees au cas par cas selon le profile du patient.

avatar Bigdidou | 

@Paquito06

"C’est vraiment le dernier de nos soucis.
Le problème, c’est qu’une firme proposant une couverture medicale mette la main dessus"

Absolument, faut pas tromper de danger.
Ça s'appelle noyer le poisson.

Ce i est également très inquiétant, utilisé dans ces conditions "mais aussi de suggérer automatiquement des traitements ou d'autres actes médicaux pour les patients, à l'aide de machine learning."

Le machine learning peut s'entendre comme un élément de la réflection médicale multidisciplinaire, mais évidemment pas la remplacer.

avatar Krysten2001 | 

Moi j’adore qu’on fouille dans mon téléphone

avatar roccoyop | 

@Depret Lucas

Je préfère qu’on fouille dans mon slip...

avatar Krysten2001 | 

@roccoyop

😂

avatar Paquito06 | 

“Contrairement à la France où le secret médical pèse lourd, la loi américaine de 1996 sur la santé et l’assurance maladie (HIPAA) autorise les hôpitaux à partager des données avec des partenaires privés, sans nécessairement informer les patients. “

C’est tres désinformateur comme paragraphe. Aux US, le secret medical pese egalement tres lourd. Il y a toujours une demande ecrite qui requiert une signature du patient pour le partage de données tres sensibles (ex. medicaments, traitements, chirurgies, etc.) entre les acteurs de la santé uniquement. En lisant ce paragraphe, on en viendrait a penser que tout peut etre partagé a la volee avec n’importe qui.

avatar Puff32 | 

Ou là, ça c’est vraiment une grosse atteinte aux libertés. Je n’ai aucune application google, ni son moteur de recherche, je n’utiliserai jamais Android, même si j’ai essayé pour voir de l’autre côté. Je n’utilise aucun réseaux sociaux, j’ai vu assez de dégâts chez des familles et autres. On a vos données médicales, ensuite on crée ou s’associe aux assurances, plus si on se met à faire de la banque. Les mouchards d’enceintes qui envahissent les maisons, gps et autres. On voit bien le futur, tu as de l’argent, tu auras droit à tout, tu es pauvre ou des maladies coûteuses et on te sort en un clin d’œil des assurances, banques et J’en passe.
Je ne veux pas dire pour autant que je fais confiance à Apple, mais qd même plus que Google, Facebook et quelques autres.
Les politiques ont intérêt de faire le ménage là dedans. Heureusement qu’au niveau Européen, on a une brillante guerrière pour les libertés en enquêtant régulière sur ces grands groupes.

avatar J'en_crois Pas_mes yeux | 

@Puff32 "Je ne veux pas dire pour autant que je fais confiance à Apple"
Tu as bien raison, je les surveille aussi.... Mais pour l'instant ça va !
"mais qd même plus que Google, Facebook"
Pas d'accord, je fais bien plus confiance à google/facebook Ils disent que la vie privée, c'est has been et qu'il veulent tout savoir de nous et ils mentent pas.
Par contre, quand ils nous disent "c'est gratuit", là j'ai plus de mal à les croire : Je crois bien que lorsqu'on verra la facture, on va tous regretter !

avatar pagaupa | 

Le problème c’est que même lorsque le patient donne son accord et signe le formulaire, il est tellement laconique qu’on ne sait pas ce qui sera transmis et à qui...

avatar YSO | 

Ce qui est inquiétant c’est que cette déviance soit présentée au travers de cet article (sans doute plus de l’autre côté) et que personne s’en offusque. Tant de notre côté qu’en face.

La machine est lancé sur l’autel de « la santé partagée et connectée » et ont a vraiment l’impression que personne ne cherche à mettre un terme à cette hypocrisie.

Après la révolution informatique nous sommes en train de vivre la révolution vers « le meilleur des mondes » façon « 1984 », impuissants !
😕

avatar Hideyasu | 

Cool, mon assurance décès va s’ajuster automatiquement quand je serai à l’hôpital, le monde parfait !
😂😂

avatar pim | 

C'est pratique, quand on est malade, plus besoin de prendre RDV chez son médecin !

« Ok Google, est-ce que j'ai la grippe ? »

« Oui, c'est bien la grippe, et c'est untel qui te l'a refilé, et tu l'as toi-même refilé à telle ou telle personne » !

Juste génial.

avatar demon_john2905 | 

Mais c’est absolument scandaleux !!! Mais que va t’il falloir pour que les gens, les politiques se réveillent !!!?? Il s’agit la des données les plus sensibles et ces vautours se jettent dessus. DES DONNÉES NOMINATIVES !!!!!!!! Ces types sont vraiment sans foi ni loi. D’une part ils ne devraient pas y avoir accès mais si des patients acceptaient, Google devrait payer ces données de l’or ! Mais la le patient ils s’endettent pour se faire soigner dans les hostos en question et google récupère tranquille ses données (NOMINATIVES ??!!!) pour s’enrichir !!

avatar Godverdomme | 

Ce qui est scandaleux, ce sont les lecteurs comme toi qui ne savent pas faire la recherche sur des sites plus sérieux et font confiance à igen//WatchGen comme source d'information.

L'entreprise en question utilise la GSuite et le Google cloud computing en interne et les données ne sont pas utilisées par Google ou rien ne le prouve en tout cas.

C'est un procès d'intention banal...

avatar demon_john2905 | 

De notre côté on a le RGPD, mais quand je vois le nombre d’hosto publiques qui contractualisent avec Doctolib et laissent le contrôle de la porte d’entrée à l’hôpital (la prise de rdv) a une (et unique) start-up, je me dis que les politiques et les administratifs n’ont aucune vision sur le long terme et ne doivent pas être abonnés à Netflix... pas cher au début, puis t’es dépendant, puis c’est plus cher... et après tu te fais racheter par Google...

avatar echarbon44 | 

Bahh Google sait déjà tout de nous...Même les enseignes qui ont pignon sur rue comme Décathlon ou Carrefour leur donne nos données...
On ne s’est rendu compte de rien mais Google est le nouveau Big Brother et il est très très difficile d’y échapper....😢

avatar Glop0606 | 

C’est marrant, quand déjà au tout début certains voyaient venir tous les dangers inhérents à la fin de la vie privée, trop de gens répondaient boah rien à cacher, tous des paranos. Et maintenant on commence seulement à voire à les conséquences de cette indulgence acceptée. Le Don’t be evil des débuts de Google prouve qu’ils connaissaient dès le début les dérives de la big data. Mais bon comme toujours, quand il y a de l’argent à se faire... Enfin bon ça a pas l’air de déranger grand monde. En tout cas même 1984 commence à ressembler à de la gnognote.

avatar zeveto | 

Nouvelle journaliste à la rédaction ??

avatar standelap | 

@zeveto

Stagiaire :)

avatar zeveto | 

@standelap

Cool ! 👍

avatar SyMich | 

Si je peux faire une suggestion d'article de fond à la rédaction...
ce serait intéressant d'analyser les différences éventuelles d'approche entre Google et Apple sur ces programmes et partenariats liés à la Santé (Pour Apple: les programmes de recherche sur la détection d'anomalies du rythme cardiaque, les nouveaux projets en lien avec le cycle menstruel, ou les partenariats avec les assurance santé notamment celle des anciens combattants)
Apple a-t-il un traitement différent des données personnelles de ce qu'on nous dit de Google dans cet article? Ou est-ce similaire?

avatar marc_os | 

@SyMich

Il faudrait faire du journalisme d’investigation pour cela, pas juste des traductions de macrumors & co.

avatar marc_os | 

« pour proposer une assurance-maladie »

dit en passant, information noyée dans ce que font les autres alors que LÀ EST LE DANGER !
A terme, vous aurez des assurances dont le coût sera 100% personnalisé.
Malades chroniques, atteints du cancer ou de quoique ce soit de sérieux juste une fois dans le passé, tenez vous prêts à racker !!

De plus, je trouve pour le moins curieux d’essayer de relativiser ces agissements de Google en écrivant « oui mais Apple, oui mais les autres... ».
Alors qu’Apple dit clairement ses intentions et que Google tente de minimiser cette affaire d’abord secrète en disant ce qu’elle ne ferait pas ! C’est pas vraiment le même genre de transparence dirais-je.

avatar SyMich | 

Il n'y a pas qu'aux USA...
Tweet d'Agnès Buzin il y a quelques instants:

Le 1er décembre prochain, le Health Data Hub sera officiellement créé.
Pour cette plateforme de partage des données de santé anonymisées, un objectif : permettre aux chercheurs et acteurs de l'innovation de développer des services améliorant la qualité des soins.

https://twitter.com/agnesbuzyn/status/1196395032074432513

Parmi ces "acteurs de l'innovation" présents à ce colloque "Données de santé & intelligence collective", on retrouve notamment Google et Apple... Étonnant non?

avatar lome_bbrr | 

@SyMich

Oo
modèle outre Atlantique impose, si c’est américain c’est que c’est bien 👍
Mais évidemment qu’on va droit dedans malheureusement
La santé est un marché comme un autre pour un libéral. Je me souviens de SICKO de Michael MOORE.. choquant

avatar SyMich | 

C'est clair... rien que le fait de nommer, en France (!?!), ce projet "Health Data Hub" montre bien d'où vient le modèle!

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