Des processeurs Intel « Swiss made » par TAG Heuer

Stéphane Moussie |

Jean-Claude Biver va peut-être finir par obtenir le label Swiss made pour la TAG Heuer Connected. « Dès 2017, une cinquantaine de personnes commenceront à faire de l’assemblage de micro-processeurs en interne », a déclaré le directeur du pôle horloger de LVMH à WorldTempus.

Guy Sémon (TAG Heuer), Jean-Claude Biver, Michael Bell (Intel) et David Singleton (Google) cassent la croûte.

« Il s’agit de la première ligne d’assemblage de microprocesseurs pour les télécoms en Suisse », s’est-il enorgueilli. Située au siège de TAG Heuer à la Chaux-de-Fonds, la salle blanche accueille déjà douze ingénieurs Intel qui installent la ligne de production et forment les équipes de l’horloger.

En assemblant des processeurs Intel en Suisse, Jean-Claude Biver espère que sa montre Android Wear à 1 400 € minimum décrochera la célèbre estampille. « Même si 98 % du reste de la montre est suisse, avec un moteur étranger nous ne pouvons pas obtenir le label Swiss made », avait-il déclaré en mars 2015, au moment de l’annonce du partenariat avec Intel et Google.

Inexistante il y a un an et demi, la TAG Heuer Connected représente près de 10 % des ventes de la marque en 2016 avec 60 000 exemplaires écoulés. Une véritable surprise alors que la prévision interne était de 20 000 unités.

La montre connectée reste marginale dans le chiffre d’affaires de l’horloger, mais « l’effet d’image est colossal », estimait en septembre le truculent dirigeant, pour qui « la marque a été rajeunie de 20 ans d’un jour à l’autre. »

Aujourd’hui, il constate que 2016 aura « probablement [été] la meilleure année de l’histoire de [TAG Heuer]. » La marque a progressé de 5 à 6 % par rapport à 2015, « alors que dans le même temps l’industrie horlogère aura grosso modo reculé de 10 %. »

Si TAG Heuer doit en partie sa bonne année à sa smartwatch, Jean-Claude Biver n’impute pas pour autant la baisse générale de l’horlogerie suisse à l’arrivée de l’Apple Watch et des autres montres connectées.

La principale cause selon lui est la « dépendance exagérée à la Chine ». « Zenith [dont il vient de reprendre les rênes, ndr] effectuait la moitié de ses ventes avec les Chinois, tout en leur vendant beaucoup de montres en or, ce qui est devenu mal vu à cause de la corruption », explique-t-il. Mais le problème ne se limite pas aux modèles en or qui ont moins la cote aujourd’hui, un changement global est en train de s’opérer, analyse-t-il :

Le nouveau consommateur qui se profile a aujourd’hui 20 ans, et ni son style de vie ni ses habitudes ne ressemblent à ce que nous connaissons. […] On le voit déjà en Chine, où TAG et Hublot proposaient des produits qui ne correspondaient pas à la perception du luxe de la clientèle chinoise des années 2010, basée alors plutôt sur des montres élégantes et classiques. Le chrono n’était pas perçu comme un produit de luxe et nos investissements marketing ne suffisaient pas à faire changer la mentalité des clients. Il a fallu l’impulsion de l’État chinois qui a donné l’instruction aux grands entrepreneurs d’investir dans le sport, et notamment dans le football. […] La nouvelle génération investit maintenant dans les objets liés au sport, dont les montres. Elle s’intéresse maintenant aux Hublot et aux TAG Heuer et non aux montres toutes fines de leurs parents. Savoir s’adapter sera décisif.

Pour 2017, l’objectif de TAG Heuer est de produire 100 000 montres connectées. Un nouveau modèle sera lancé au printemps dans le monde entier. L’avancée dans la high-tech passe aussi par l’ouverture d’un centre de recherches d’une dizaine d’ingénieurs au sein du campus d’Intel, à Santa Clara.

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