Les AirPods, talon d’Achille de la démarche environnementale d’Apple

Anthony Nelzin-Santos |

« Votre appareil vous accompagne au quotidien. Et vous comptez sur lui », dit Apple sur le site consacré à sa démarche environnementale : « il est donc conçu pour résister à des années d’utilisation et continuer à servir longtemps. » C’est indubitablement le cas de l’iPhone, de l’iPad, et du Mac. Mais les AirPods ? Sont-ils vraiment « fabriqué[s] dans des matériaux durables » ?

Daisy, le robot qui démonte des iPhone. Image Apple.

Cette question est d’une importance majeure : Apple vend des millions d’AirPods. Au même titre que leurs ancêtres les écouteurs blancs de l’iPod, ils ont acquis un statut iconique, jusqu’à devenir un véritable phénomène social. Après deux ans d’utilisation quotidienne toutefois, ils quitteront vos oreilles pour rejoindre le bac de recyclage de votre boutique Apple locale dans le meilleur des cas, le fond de votre tiroir au pire.

En cause : leur petite batterie. Avec le temps et l’usage, ses capacités se dégradent, c’est normal. Mais elle ne peut pas être remplacée. Peut-elle au moins être extraite, et les composants des AirPods peuvent-ils être revalorisés ? Le rapport de « responsabilité environnementale » d’Apple n’en dit rien. Il ne mentionne qu’une seule fois les AirPods, et encore, seulement dans une liste de produits assemblés dans des usines certifiées par le cabinet de consulting UL.

Depuis plus de dix ans, Apple publie des « fiches environnementales » pour tous ses produits. Tous… sauf les AirPods1. On pourrait objecter que les accessoires comme les claviers et les souris n’ont jamais été concernés par ces fiches. Mais ils le devraient, et d’autres périphériques comme l’Apple Watch et le HomePod en possèdent une. L’Apple Watch est-elle moins accessoire que les AirPods, elle qui ne peut être configurée sans l’aide d’un iPhone ?

Or ces fiches sont très détaillées : elles donnent le rendement des chargeurs, la liste des matériaux utilisés pour la fabrication des appareils, et même une estimation de la quantité de gaz à effet de serre émis lors de la durée de vie du produit. Elles font partie d’un ensemble de documents qui permettent de comprendre l’impact environnemental des appareils frappés d’une Pomme, et de prendre des décisions informées.

Apple s’est érigée en championne du développement durable. Avec raison : achetez un iPhone ou un Mac aujourd’hui, et vous avez l’assurance qu’il recevra des mises à jour logicielles pendant cinq à sept ans, et que vous pourrez trouver des pièces détachées pendant « les cinq années suivant la fin de la production de ces appareils ». Après des années de fiers services, vous pourrez enfin le ramener en boutique, où il entrera dans le circuit de recyclage et de revalorisation le plus perfectionné de l’industrie.

Mais achetez une paire d’AirPods aujourd’hui, et vous n’aurez pas les mêmes garanties. La batterie peut-elle être séparée du plastique de manière sure ? Apple vante les capacités de son robot démonteur d’iPhone, mais rien ne laisse entendre que les AirPods puissent être désossés et recyclés de la même manière. « Les produits les plus avancés sont ceux dont l’impact environ­nemental est le plus faible », dit Apple — mais quel est l’impact environnemental des AirPods ?

Le fait est que vous pouvez prendre tous les arguments de son site sur l’environnement, et placer les AirPods en contrargument. L’ambition d’excellence environnementale d’Apple ne peut s’arrêter aux principaux produits — elle doit s’étendre aux accessoires, qui sont précisément les produits qui ont le plus de chance de finir dans une décharge. Après trois ans et un succès fulgurant, quelques informations sur l’impact environnemental des AirPods ne seraient probablement pas de trop.


  1. De la même manière, les AirPods sont absents de la page dédiée à l’exposition aux radiofréquences. Pourtant, Apple publiait le DAS de l’Apple Watch avant même qu’elle ne soit dotée d’un modem cellulaire. ↩︎
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