Au grand dam de bien des analystes, Tim Cook n’a révélé aucun chiffre de ventes concernant l’Apple Watch durant le special event. Une stratégie suivie depuis le lancement de la montre connectée l’an dernier, et qui est source de bien des fantasmes. L’Apple Watch, ça se vend ou pas ?
Le CEO d’Apple a toutefois bien voulu donner une idée du succès de son garde-temps intelligent. Avant la présentation de la Series 2, il a mis les pendules à l’heure si on ose dire, avec une information : l’Apple Watch est la montre connectée la plus populaire du marché. La concurrence a beau s’accrocher, avec parfois des produits intéressants comme la Gear S3 chez Samsung, rien à faire, Apple est solidement installé en haut du classement. L’histoire est très différente si on y ajoute les bracelets connectés des Fitbit et consorts (lire : Fitbit domine tandis que les ventes d'Apple Watch chutent).
Surtout, Tim Cook a dégainé un classement parlant : celui des ventes mondiales de montres tout type confondu, concocté par la firme Vontobel. Quelques mois après son lancement, l’Apple Watch se positionnerait déjà à la deuxième place !
En l’absence de chiffres de vente, il est difficile de mesurer la distance qui sépare Rolex d’Apple, le vénérable horloger suisse étant lui aussi peu loquace. On sait simplement que ses ventes annuelles pour l’an dernier ont tourné autour de 4,5 milliards de dollars et on estime qu’il écoule bon an mal an un million de montres. En volume, la Pomme a certainement vendu plus d’Apple Watch en 2015 ; en valeur, Apple n’en est sans doute pas très loin.
Ce tableau, pour flatteur qu’il puisse paraitre pour Apple, pose tout de même un petit problème : il y manque l’éléphant dans le magasin de porcelaine, c’est à dire Swatch ! Le groupe horloger a généré 7,7 milliards d’euros de chiffres d’affaires en 2015 (il détient Omega, Longines, Tissot et Breguet, mais il produit aussi des montres sous sa marque propre). Et puis on peut se demander où sont passés les constructeurs chinois qui ont produit 663 millions de montres l’année passée, contre un peu plus de 29 millions pour l’industrie suisse… Certes, le panier moyen n’a rien à voir non plus : il était de 739 $ pour les montres suisses, contre… 3 $ pour les toquantes chinoises.
Si Steve Jobs maîtrisait l’art du champ de distorsion de la réalité comme personne, Tim Cook a encore des cours à prendre dans ce domaine. Même s’il est vrai que les horlogers suisses sont en difficulté (lire : Les ventes de montres suisses s'enfoncent dans le rouge), Apple a donc encore quelques efforts à faire pour prétendre faire aussi bien ou mieux encore que les constructeurs les plus importants du secteur. Cela pourrait cependant arriver plus vite qu’on ne le pense : avec un prix d’attaque de 269 $ (319 € en France), l’Apple Watch devrait trouver facilement une place sur de plus nombreux poignets.
Si l’Apple Watch Edition est toujours au catalogue, Apple a troqué l’or 18 carats pour de la céramique, et divisé les prix par dix. Là où l’Edition « premier prix » était de 10 000 $, le modèle en céramique débute à 1 249 $ « seulement ». De quoi rasséréner quelque peu les horlogers suisses.
Jean-Claude Biver, le patron de la division montres chez LVMH, estime chez Bloomberg qu'Apple ne peut pas jouer dans la même cour que les fabricants de montres luxueuses suisses. Le retrait de l'Apple Watch Edition en or indique que ces horlogers avaient « raison de ne pas se préoccuper des montres connectées ». Un discours étonnant alors que Biver a présenté l'an dernier, pour le compte de TAG Heuer, une Carrera Connected développée en partenariat avec Google et Intel…
« Mais d’un autre côté, c’est un signe à destination des marques moins haut de gamme qu’elles devraient essayer de faire une montre connectée », poursuit-il. « parce que si Apple est déjà devenue le deuxième constructeur de montres, sans avoir jamais conçu de montre par le passé, cela signifie que le marché des montres connectées existe ».