L'Apple Watch a-t-elle encore un intérêt pour les développeurs ?

Mickaël Bazoge |

La disparition de l'application Instagram pour l'Apple Watch a ravivé les interrogations et les inquiétudes autour de l'App Store de la montre connectée. C'est d'autant plus vrai qu'Instagram n'est pas la première app d'un grand éditeur à disparaitre des poignets. Avant elle, Google Maps a fait ses valises, eBay également, tout comme Twitter, Amazon, Target (lire : Apple Watch : la fuite des apps).

Malgré ces départs qui font forcément du bruit en raison du pedigree des apps en question, il serait incorrect de parler d'hémorragie. Pour preuve, l'App Store de l'Apple Watch compte aujourd'hui dix fois plus d'applications qu'au lancement de la boutique, le 23 avril 2015. À l'époque, Apple avait annoncé un catalogue de 3 000 applications. Quasiment trois ans plus tard, le magasin dénombre un peu plus de 30 000 apps, selon WatchAware.

Selon le décompte de ce site spécialisé, la progression est régulière depuis l'ouverture de la boutique, avec un pic de soumissions dans les premiers mois : en décembre 2015, le catalogue avoisinait déjà les 15 000 apps. En avril 2016, l'App Store dépassait les 18 000 applications, puis en mai 2017 il flirtait avec les 27 000 apps.

Ce n'est pas si mal, quand on sait que l'App Store de l'iPhone a commencé avec 500 apps, et que celui pour l'iPad a débuté avec une sélection de 3 300 apps. Aujourd'hui, la boutique iOS en compte 2,1 millions, un chiffre qui est d'ailleurs en baisse pour la première fois en dix ans.

Il parait néanmoins illusoire de penser que le nombre d'applications pour Apple Watch tutoiera un jour les sommets de son grand frère. La nature même de l'Apple Watch, avec son petit écran et la fatigue d'une manipulation trop longue, limite les interactions et l'engagement avec des apps. Apple elle-même a lié les mains des développeurs : les premières apps pour la montre dépendaient pratiquement entièrement du goulot d'étranglement de sa connexion avec l'iPhone.

La plupart des « grosses » applications dont on a évoqué la disparition ci-dessus ont été développées avec la première version, très limitée, du SDK de l'Apple Watch. Or, depuis le 1er avril, Apple exige que les apps watchOS soient conçues a minima avec le kit de développement de watchOS 2.

Dans ces conditions, il n'est pas étonnant de voir des applications lancées dans l'euphorie du lancement de la montre s'évanouir ainsi. On sait combien il est important pour un nouveau produit et une nouvelle plateforme de s'appuyer sur des noms connus pour son lancement. Maintenant que l'Apple Watch est une machine bien rodée, la présence ou plutôt l'absence de ces apps a moins d'importance.

C'est d'autant plus vrai qu'avec le temps, les usages de l'Apple Watch se sont resserrés. La montre est pratique pour les notifications, le suivi de l'activité physique, éventuellement pour obtenir rapidement une information (transports, rendez-vous…). Moins pour consulter des photos, pour tweeter, pour faire du shopping.

Snowy, le client tiers pour Spotify qui n'est jamais sorti.

Apple voudrait bien aussi que l'on utilise sa montre comme un baladeur connecté : la Series 3 est devenu un client Apple Music, après tout. Spotify pourrait aussi rejoindre la fête, après avoir pris sous son aile le développeur de Snowy, une app tierce (lire : L'application Spotify pour l'Apple Watch pourrait faire du bruit à la WWDC).

Comme quoi, les grands éditeurs s'intéressent toujours à l'Apple Watch… pour peu qu'ils y trouvent un intérêt. On observe plutôt une rationalisation de l'offre d'applications, plus en phase avec l'utilisation réelle de la montre. Cela ne doit pas exonérer Apple de faire son travail : le constructeur doit ainsi poursuivre « l'autonomisation » de l'Apple Watch, en réduisant toujours plus les liens qui retiennent la montre à l'iPhone.

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