La réalité mixée de Magic Leap est encore très virtuelle

Mickaël Bazoge |

Magic Leap est devenu le chouchou des investisseurs depuis que des cadors de l’industrie des technologies, Google et Alibaba en tête, ont investi dans cette start-up. Elle a levé 1,4 milliard de dollars en trois ans, ce qui en porte la valorisation à 4,5 milliards. Pas mal pour une entreprise qui n’a encore rien produit de concret (lire : Magic Leap : la réalité avec une touche virtuelle).

La jeune pousse, créée par Rony Abovitz, est surtout riche de ses promesses, raconte un long article de The Information. Bien peu de monde a pu tester la technologie révolutionnaire de « réalité mixée » que cette société est en train de développer. Le journaliste du site a pu en essayer une version mal dégrossie, à savoir un gros casque encombrant relié à un ordinateur avec plusieurs câbles.

Rony Abovitz, fondateur de Magic Leap —

La démonstration a en fait beaucoup ressemblé à ce que peut proposer l’HoloLens, à l’exception notable du flou dans les images lorsque le testeur bougeait la tête. Un problème qui sera résolu avec la version finale de l’appareil, qui devrait être un appareil beaucoup plus compact que le journaliste n’a malheureusement pas pu essayer. L’objectif est de parvenir à un dispositif pas plus encombrant qu’une paire de lunettes.

Visiblement, tout est encore bien loin d’être prêt chez Magic Leap, bien que l’entreprise a assuré cet été que son premier produit serait prêt « bientôt ». Le travail à accomplir est immense, il s’agit en fait de miniaturiser un prototype de la taille d’un frigo (l’engin a été nommé « The Beast »). Et les technologies mises au point ou imaginées pour cette expérience de réalité mixée ne seront pas toutes intégrées à la première version finale du produit.

Une image censée représenter les capacités de Magic Leap — Cliquer pour agrandir

Ce lent développement est d’autant plus problématique que Microsoft n’a pas perdu de temps. Certes, Rony Abovitz assure que la technologie de Magic Leap est différente et meilleure que celle d’HoloLens. Mais d’une part il faut le croire sur parole, d’autre part Redmond a un coup d’avance avec la version Dev Kit de son casque (à partir de 3 299 € en France).

Pourtant, Magic Leap a les moyens de ses ambitions : difficile de parler de start-up avec des effectifs de 800 employés répartis un peu partout dans le monde ; pour donner un ordre d’idée, au moment de lancer son thermostat connecté Nest comptait 75 employés. Idem pour Oculus lors de son acquisition par Facebook.

De plus, si les développeurs peuvent déjà concevoir des applications pour HoloLens avec des dispositifs qu’ils peuvent tester chez eux ou au bureau, Magic Leap ne prévoit pas de kit de développement : il faudra se rendre dans un des bureaux de la société pour tester une application !

En attendant, Magic Leap maintient l’excitation (des investisseurs, surtout) au travers de quelques vidéos impressionnantes. La première, qui date de mars 2015 (ci-dessus), prenait les spectateurs pour des idiots puisqu’elle n’a pas été tournée au travers d’un casque Magic Leap : c’est Weta Workshop, la société d’effets spéciaux qui a planché sur des films comme « Mad Max : Fury Road » ou la trilogie du Hobbit qui s’est chargée de la réalisation de ce film.

Devant le tollé provoqué par cette révélation, Magic Leap a décidé de tout faire pour s’approcher le plus possible de cette vraie-fausse démonstration. La vidéo ci-dessous a été réalisée avec un casque et n’a pas été retouchée :

Le nœud technologique dont Magic Leap n’arrive pas à se défaire est ce que la start-up appelle un écran “fiber scanning” qui diffuse un laser au travers d’un câble de fibre optique, dont les mouvements sont capables de reproduire des images. Cet écran ne fonctionne pas, c’est pourquoi il fait maintenant partie des objectifs à long terme, un « compromis » selon le mot d’Abovitz.

Le PEQ (pour « product equivalent ») est le prototype le plus avancé de Magic Leap, celui que le journaliste n’a pas pu tester. Le fondateur de la société indique qu’il fonctionne un peu moins bien que le modèle avec les câbles le reliant à un ordinateur. Tout cela n’est pas de très bon augure pour une entreprise qui annonçait monts et merveilles…

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